mercredi 18 mai 2011

L’internet vu par les psychothérapeutes

Vint Cerf playing Spacewar on PDP-1 

Le portail Cairn.info regroupe façon pratiquement exhaustive les publications francophones en sciences humaines et sociale. On y trouve les revues phares dans lesquelles les psychothérapeutes élaborent leurs théories et discutent de leurs pratiques donc un bon poste d’observation pour comprendre ils se sont emparés de l’Internet et les questions qu’ils se posent au sujet du réseau

Une requête avec les mots clé « psychothérapie » et « internet » renvoie 752 articles que l’on peut ranger dans trois catégories.

Dans leur très grande majorité, le mot Internet est utilisé à dans des expression comme « le site internet ». L’auteur renvoie alors à une ressource qui se trouve en ligne, et le réseau n’est pas l’objet de la discussion. Dans une seconde série d’articles, l’internet est associé à un contexte négatif. Il est alors fait référence à « l’addiction à l’internet et aux jeux vidéo ». Enfin, une troisième série d’article examine les liens possible entre la psychothérapie et le réseau.

Jacqueline Poulain-Colombier (2000) est assez enthousiaste : « L’e-psychanalyse met au service de la tradition de correspondances des psychanalystes des moyens techniquement remarquables et qui vont faciliter considérablement le traitement de leurs archives » L’Internet pourrait donc jouer le même rôle que la correspondance entre Sigmund Freud et Wilhem Fliess a pu jouer dans la naissance de la psychanalyse

Jacqueline Poulain-Colombier Le Mouvement psychanalytique, Revue des revues freudiennes, Paris, L’Harmattan, vol. III, n°1,2000, p. 89.

Yann Diener note que l’Internet a déjà joué un rôle dans la crise majeure qui a secoué l’Ecole de la Cause Freudienne en 1998. Les abonnés des différentes listes de diffusion ont pu voir passer des courriels enflammés des uns et des autres relatant par le menu le conflit qui les opposait : « L’Interneta déjà participé à d’autres mouvements dans les institutions analytiques, en particulier lors de la crise à l’École de la cause freudienne qui s’est jouée sur le Net en 1998 et qui a donné le jour à une nouvelle association, les Forums du champ lacanien »

Yann Diener « La poubellication à l'âge de l'Internet », Essaim 1/2001 (no7), p. 121-127.
URL : www.cairn.info/revue-essaim-2001-1-page-121.htm.
DOI : 10.3917/ess.007.0121.

Il note également que les psychanalystes ont profité des fonctions de publication du réseau en offrant à des textes une adresse toute particulière :

« par le brouillage de la limite entre privé et public qu’il occasionne, il a fonctionné comme adresse temporaire pour ces textes, permettant une disjonction entre l’auteur et le contenu de son texte. Ce qui permet de penser qu’utilisé activement, le Net pourrait participer à la réflexion sur les institutions analytiques et sur le passage du discours de l’analyste en intension au discours de l’analysant en extension »

Yann Diener « La poubellication à l'âge de l'Internet », Essaim 1/2001 (no7), p. 121-127.
URL : www.cairn.info/revue-essaim-2001-1-page-121.htm.
DOI : 10.3917/ess.007.0121.

Même s’il met beaucoup l’accent sur l’écriture de textes non signés, qui est une tradition lacanienne que tous les psychanalystes ne partagent pas, Yann Diener avance des questions sur la transmission de la psychanalyse. « Le Net ne sera-t-il qu’un outil de plus pour aider les psychanalystes à se rencontrer, à échanger des articles ou des programmes de colloques, comme c’est déjà le cas, ou bien participera-t-il à l’invention de nouvelles règles pour maintenir ouverte la question de la transmission de la psychanalyse ?  Il ne pourra devenir une partie du dispositif de transmission que si sa spécificité est utilisée. Une des originalités de l’Internetest de rendre aisée la publication de textes non signés, ce qui pourrait donner un autre rapport à la production de travaux cliniques. S’il est difficile de parler d’un cas, c’est en partie parce que le clinicien s’y trouve exposé. Or il est difficile de ne pas signer un écrit dans une revue ou un livre. »

Yann Diener « La poubellication à l'âge de l'Internet », Essaim 1/2001 (no7), p. 121-127.
URL : www.cairn.info/revue-essaim-2001-1-page-121.htm.
DOI : 10.3917/ess.007.0121.

La question est en effet d’importance : Comment, au 21e siècle, avec un dispostif tel que l’Internet, est ce que la psychanalyse se transmet ? Comment se transmet-elle dans l’espace public ? Et comment se transmet elle de psychanalyste à psychanalyste ? Dans quelle mesure est ce que l’Internet influe sur ce processus ?

Jocelyn Troccaz (2001) examine trois situations de soin : la chirurgie, l’utilisation de la réalité virtuelle pour phobiques et grands brûlés et la cyberthérapie. Elle note que l’ordinateur assiste le chirurgien en augmentant la réalité soit en donnant à voir des structures anatomiques, soit en lui faisant sentir une trajectoire à suivre ou une zone à ne pas dépassé. Pour les phobiques, la réalité virtuelle permet de produire de façon contrôlée une réaction émotionnelle. Enfin, les cyberthérapies mettent en jeu un virtuel « d’un ordre tout à fait différent : ce virtuel se place au niveau purement subjectif; le sujet part à la rencontre d’un “autre virtuel” qu’il construit sur la base d’éléments réels extrêmement limités par le type et la forme de communication intersubjective induite par l’ordinateur. La représentation n’est plus le fait d’une construction par l’ordinateur mais est celle du sujet; l’ordinateur ne fait que faciliter cette construction. »

Jocelyne Troccaz « L'ordinateur dans la pratique de soins : de la chirurgie au soin psychologique assistés par ordinateur », Champ psychosomatique 2/2001 (no 22), p. 11-24.
URL : www.cairn.info/revue-champ-psychosomatique-2001-2-page-11.htm.
DOI : 10.3917/cpsy.022.0011.

Pour Henri Maldiney (2001), la communication sur Internet n’est pas une vraie communication :

Tous les procédés techniques de communication confondent insidieusement communication et information : il y a un émetteur, un message, un récepteur. Mais la véritable communication est transformatrice. Ce ne sont pas Internetou les téléphones portables qui définissent la véritable communication. Ce ne sont pas non plus les médias, qui pourtant s’en arrogent le titre : ils veulent être des médiateurs, mais ne sont, au sens le plus vulgaire, que des entremetteurs.
Henri Maldiney « L'homme dans la psychiatrie », Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe 1/2001 (no 36), p. 31-46.
URL : www.cairn.info/revue-de-psychotherapie-psychanalytique-de-groupe-2001-1-page-31.htm.
DOI : 10.3917/rppg.036.0031.

En 2003, Lise Demailly, une habituée des listes de diffusion de psychanalyse, dresse un paysage de l’Internet francophone des professions de santé. Elle reprend l’idée communément développée sur ces listes et par le conseil de l’ordre des médecins : « la « consultation » sur internetest « à ce jour difficilement admissible en France », et passible de condamnations pour médecine à distance. »

Bernard Convert et Lise Demailly « Internet et les professions de sante », Réseaux 4/2003 (no 120), p. 241-269.
URL : www.cairn.info/revue-reseaux-2003-4-page-241.htm.
DOI : 10.3917/res.120.0241.

Sylvie Craipeau et Bernard Seys (2005) regrettent « le discours culpabilisant concernant l’usage des jeux vidéo. Vecteurs d’addiction et de comportement violent, les jeux vidéo et Internetseraient vecteurs de psychopathologie. Nous montrerons que ce discours est, sur le fond, technophobe et que les usages « souffrants » des jeux vidéo et sur Internetsont plus liés à un déplacement sur ces objets de symptômes déjà existants. En fait, les jeux sur Internetrelèvent d’une nouvelle forme culturelle qu’ils contribuent à développer. Celle-ci s’inscrit dans des formes de sociabilité, une relation au corps et à l’autre, à l’intimité, qui se transforment.”

Sylvie Craipeau et Bertrand Seys « Jeux et Internet : quelques enjeux psychologiques et sociaux », Psychotropes 2/2005 (vol. 11), p. 101-127. URL : www.cairn.info/revue-psychotropes-2005-2-page-101.htm. DOI : 10.3917/psyt.112.0101.

Mar c Valleur fait rentrer l’addiction aux jeux vidéo dans son modèle dépendance / ordalie. Pour Marc Valleur, les addiction sont des entités à deux faces. L’un est désubjectivante tandis que l’autre est une quête de sens « La transgression et la conduite ordalique, qui correspondent au versant le plus risqué et le plus actif des addictions, s’opposent à leur autre versant de dépendance, qui est recherche d’oubli de soi, de refuge, de répétition »

Marc Valleur « A propos des addictions sans drogue », Etudes 10/2007 (Tome 407), p. 331-342.
URL : www.cairn.info/revue-etudes-2007-10-page-331.htm.

Anne Roux rapporte un cas clinique dans lequel une psychothérapie a été précédée d’une psychothérapie en ligne. Le texte sert surtout à réaffirmer ce que la psychothérapie en face à face à d’irremplaçable.

Anne Roux« La e-psychothérapie est elle possible ? » Champ psychosomatique 2006/3 (n° 43)

Hubert Lisandre et Geoffroy Willo(2007) examinent en quoi les avatars utilisés en ligne sont des doubles de soi et comment ils engagent les symbolisations sensori-motrice, imagées et verbales.

L’avatar peut «  incarner un fragment de soi, un personnage qu’on a connu, admiré ou redouté, voire quelqu’un qu’on a imaginé à partir de récits entendus ou d’une légende familiale » L’exploration des avatars utilisés par un patient peut être « un moment essentiel d’une psychothérapie » Les auteurs appellent les psychothérapeutes à mieux prendre en compte ce nouvel environnement non-humain qu’est l’Internet.

Hubert Lisandre et Geoffroy Willo « Virtuellement vôtre les sites de rencontre », Le Carnet PSY 8/2007 (n° 121), p. 39-41.
URL : www.cairn.info/revue-le-carnet-psy-2007-8-page-39.htm.
DOI : 10.3917/lcp.121.0039.

Dans « Psychothérapies en ligne – histoire, questions éthiques, processus » (2008) Yann Leroux examine la façon dont les psychothérapeutes ont intégré l’Internet dans leurs pratiques et regrette le peu d’intérêt que les francophones semblent manifester pour ces questions.

Yann Leroux «Psychothérapies en ligne – histoire, questions éthiques, processus », Psychothérapies 2008/3 (Vol. 28)

 

On note clairement un effet millenium. Autour des années 2000, des psychothérapeutes s’intéressent à la manière dont l’Internet peut modifier leurs pratiques, qu’il s’agisse des pratiques individuelles ou des pratiques cliniques. Ce même mouvement a existé chez les psychothérapeutes anglo-saxons et les a conduit a formaliser les pratiques cliniques en ligne d’abord dans le cadre de l’ISMHO (http://www.ismho.org) puis dans le cadre d’associations professionnelles. En France, la question a été traité différemment. Curieusement, la question des articulations possible entre la psychothérapie et le réseau a surtouté été relevée par des non-thérapeutes. L’enthousiasme de départ a laissé place à des inquiétudes et à des discours dévalorisant l’Internet. Du coté des psychothérapeutes, le silence qui s’est installé est d’autant plus étonnant que les pratiques en ligne se multiplient dans le même temps

 

 

Crédit Photo :  Vint Cerf playing Spacewar on PDP-1 par Joi

mercredi 11 mai 2011

Les 7 étapes de la haine dans les groupes

John R. Schaffer et Joe Navarro ont donné un modèle en sept étapes des groupes haineux qui permet de mieux comprendre comment se met en place le harcèlement.

Shaffer et Navarro travaillent au FBI. Il se basent sur une étude de groupes de skinhead qui a fait émerger des éléments spécifiques. Il s’agit de jeunes blancs âgés de 14 à 24 ans, élevés généralement dans une famille monoparentale et ou dysfonctionnelle. Mais la clé de ces groupes est qu’ils sont composés de personnes profondément insécures.

Plus une personne est insécure, plus elle a de chance de s’appuyer sur la haine de l’autre pour masquer ses propres angoisses. La haine est en effet un ciment extrêmement efficace : elle est un sentiment universel, elle procure des émotions extrêmement fortes, et elle lie d’autant plus étroitement un groupe que chacun craint d’être l’objet de a haine de tous les autres. Agresser un autre, extérieur au groupe, c’est l’assurance de ne pas être agressé par le groupe.

Ce modèle prend en compte comment les groupes  haineux se définissent, comment ils désignent leur victime, comment ils la provoquent et finalement l’agressent. Leur modèle est basé sur l’insécurité : “toutes les personnes insécures ne sont pas haineuses, mais toutes les personnes haineuses sont insécures”. Il font remarquer que la haine peut être rationnelle ou irrationnel, mais que les groupes haineux privilégient l’irrationalité.

Le modèle donne les 7 stades suivants :

Stade 1. Les personnes haineuses se rassemblent

La haine est rarement vécue dans la solitude. Les personnes haineuse haïssent en commun. La haine vécue en commun est un soutien de l’estime de soi. Elle empêche les mouvements introspectifs qui permettraient de critiquer l’irrationalité de la haine. La situation groupale donne un anonymat protecteur et diminue le sentiment de responsabilité

Stade 2. Le groupe haineux se défini .

Des symboles, des rituels, et des mythologies servent à dévaloriser l’objet haï et à augmenter l’estime de soi des membres du groupe.  Les symboles utilisés vont des vêtements à des signes secrets par lesquels les membres du groupe se reconnaissent. Les mythologies explicitent  pourquoi l’objet doit être haï.

Stade 3. Le groupe haineux dénigre une cible.

En rabaissant l’objet de leur haine, les membres du groupe augmentent leur image de soi et leur statut dans le groupe. Les membres du groupe se livrent à une escalade dans les manifestations de haine pour  montrer à quel point ils sont attaché dans le groupe et pour se différencier dans le groupe.

Stade 4. Le groupe haineux provoque une cible.

L’escalade donne lieu a un premier passage à l’acte. Le groupe provoque verbalement une cible. Des insultes sont proférées, et des geste offensant exécutés. Des graffitis peuvent apparaitre dans l’environnement de la victime. Le groupe proclame la possession de territoires a proximité de (ou appartenant à)la victime, ou

Stade 5. Le groupe haineux attaque la cible.

Un nouveau degré est franchi : des coups sont portés. Les attaques ne sont plus verbales, elles sont agies. Le groupe exécute des rondes à la recherche de cibles. La violence soude le groupe tout en l’isolant du reste de la société. Plus la violence est grande, plus l’isolement est grand, plus le groupe est soudé, plus le groupe recours à la violence pour assurer à ses membres une estime de soi et une sécurité suffisante.

Stade 6. Le groupe utilise des armes contre la cible

Le groupe s’équipe d’armes et les utilise contre la cible. Les armes blanches sont préférées pour le contact immédiat avec cible. Elles nécessitent la mise en jeu d’une très grande violence tout en restant dans un contact maximum avec la cible.

Stade 7. Le groupe détruit la cible.

La destruction de la cible donne un sentiment de toute puissance aux membres du groupe. L’estime de soi est renforcées à un très grand niveau. Mais cette augmentation est fictive, car elle n’est pas conforme aux idéaux de la société.

 

Le modèle en 7 étapes de la haine à l’école ou au travail.

Le modèle a été construit à partir des groupes de skinheads, mais il est tout à fait utilisable dans le contexte du harcèlement au travail ou à l’école. La destruction de la cible est symbolique. Elle n’en est pas moins réelle.

Au travail ou à l’école, une personne vivant à l’encontre d’une autre un sentiment haineux aura tendance à chercher d’autres personnes avec qui partager ce sentiment (Stade 1). Le groupe adopte des symboles et des comportements qui le définissent. On se tait à l’approche de la cible, on utilise des mots-clés pour parler d’elle en sa présence, on l’isole des activités du groupe (Stade 2). Les personnes dénigrent ensemble la cible (Stade 3) Puis la cible est ouvertement insultée, directement ou par des réflexions faites à haute voix (Stade 4) Des inscriptions sont faites sur le bureau de la cible, ses affaires sont abimées ou détruites, des images photoshoppées la montrent tuée. (Stade 5) La réputation  de la cible est attaquée au travers de rumeurs et de d’insinuations lancées par le groupe (Stade 6). L’environnement de la cible devient invivable (Stade 7).

En France, des Assises Nationales sur le harcèlement à l’école ont été suivies par une campagne de sensibilisation sur la violence scolaire. Le phénomène n’est pas nouveau. On le trouve déjà sous la plume de Gustave Flaubert :

Je fus au collège dès l'âge de dix ans et j'y contractai de bonne heure une profonde aversion pour les hommes, - cette société d'enfants est aussi cruelle pour ses victimes que l'autre petite société - celle des hommes.” Gustave Flaubert. Mémoires d’un fou

D’autres exemples du harcèlement scolaire dans la littérature

Les réseaux sociaux donnent a la haine de nouveaux terrains d’expression. La haine se poursuit dans le cyberespace, et permet de toucher la cible ou qu’elle se trouve. Les sites de réseaux sociaux permettent de trouver rapidement des personnes ayant un objet de haine commun (Stade 1), d’utiliser des symboles comme des hastag ou des images de profil pour se reconnaitre (stade 2), dénigrer la cible sur le réseaux (stade 3). Le réseau social est ensuite utilisé pour insulter la cible (stade 4). Au stade suivant (Stade 5) son espace numérique est attaqué (vol d’identité, et diffusion d’éléments personnels sont caractéristiques). La réputation de la cible est attaquée par des campagnes de diffamation (stade 6) et la cible finit par quitter le réseau social ou l’internet (stade 7)

 

L’intérêt de ce modèle est qu’il donne une représentation de ce qui se passe et de ce qui risque d’arriver.  Plus l’intervention se fait en amont dans le modèle, plus elle est efficace. La cible n’a pas eu à souffrir de dommages parfois irréversibles, et les la haine n’a pas eu le temps de souder des identités dans un groupe.

Des graffitis haineux sur une table ou des messages provocateurs sur le mur facebook d’un enfant ne sont pas des choses bénignes. Ce sont des signes à prendre au sérieux, et à traiter rapidement afin que les choses n’aillent pas plus loin.

samedi 7 mai 2011

Facebook et le travail psychosocial

Il est étonnant de constater avec les lenteurs lesquelles les institutions éducatives et psychosociales s’installent sur le réseau Internet. Alors que dans la société française, le taux d’équipement passe le cap de 100% pour la téléphonie mobile et que les français sonts hautement connectés (71,3 % des Français ont internet à la maison) les institutions qui les soignent et qui soignent leurs enfants sont encore majoritairement absentes de l’Internet. Cette lenteur est principalement due à des préjugés et des méconnaissances concernant le réseau. Pourtant, les institutions éducatives et psychosociales ont tout à gagner à être sur le réseau.

 

Facebook permet de diffuser des documents en lien avec le travail psychosocial. L’institution peut se servir de Facebook pour se présenter, mais elle peut aussi tirer des bénéfices importants des aspects dynamique du réseau social.

Elle peut présenter des ressources en lien avec l’institution, le travail qui y est fait,  et la population qu’elle y accueille. Elle fera alors un travail de pédagogie et de décodage en direction du public. Elle peut par exemple faire une veille législative sur le secteur qui la concerne. Cela permettra a ses usagers d’être au fait de leurs droits, et de bénéficier d’une bonne source d’information. Le compte Facebook lui permettra également de bénéficier d’une voie montante. Un compte Facebook donne la parole aux autres. Il permet de faire ce qui est en première page de tous les projets des institutions psycho-sociales : entendre la parole de l’autre; en tenir compte. C’est précisément ce que permet de faire Facebook  : les murs sont des espaces d’accueils de l’autre, de ses idées, de ses émotions, de ses souvenirs.

L’institution peut présenter sur Facebook son projet institutionnel. La présentation ne sera pas celle en majesté que l’on trouve sur les sites web  d’établissements psychosociaux et de soin. Elle sera une présentation habitée et suivie. Le projet institutionnel est présenté pas à pas, c’est-à-dire que sont annoncés et discutés les difficultés, les errements, les impasses mais aussi les succès, les inattendus heureux et les adéquations que rencontre tout projet institutionnel.

Facebook peut être utilisé comme une plate-forme, c’est à dire comme un carrefour qui reçoit et distribue des documents en lien avec une activité.  Les prises en charge (psychomotricité, pédagogie, éducation, psychothérapies…) ainsi que les professions qui les mettent en œuvre peuvent s’y présenter. Des questions sur les prises en charge pourront trouver là des réponses. Certaines questions sont en effet suffisamment générales pour pouvoir trouver une réponse publique. Les autres questions peuvent être traitées dans des groupes fermés, et certaines questions ne seront jamais traitées en ligne. Le compte peut être utilisé pour faire connaitre les livres, les films, les émissions qui parlent d’un sujet qui intéresse l’institution. Il peut aussi être le lieu ou se prépare puis se poursuit une rencontre qui a été faire dans l’institution. Cela permet à ceux qui ne peuvent pas se déplacer de garder un lien avec ce qui se fait dans l’institution.

Il peut s’agit d’une page ou d’un groupe Facebook. La principale différence est que les permettent des contrôles d’accès plus fin.  Il peut être intéressant de limiter l’accès au compte Facebook d’une institution à ceux qui la fréquentent. Cela peut aussi être un élément du projet institutionnel que d’ouvrir l’institution au monde extérieur. Dans ce cas, une page sera plus appropriée.

Un compte Facebook peut être utilisé pour suivre un projet particulier. Par exemple, la sortie des enfants d’un IME ou un groupe de chômeurs peuvent utiliser le dispositif pour préparer leurs activités, rendre compte de son avancement, et en tirer des conclusions. Le compte renforce la cohésion du groupe par les interactions qui se produisent en ligne.

Un compte Facebook peut être le journal d’une activité, d’un groupe, ou d’une institution. Il sera le lieu de contact avec l’extérieur. Lorsque l’institution prend en charge des enfants, cela est particulièrement utile. Les parents peuvent être ainsi facilement intégrés aux activités de leurs enfants tout en restant à l’extérieur. Ils sont dedans et dehors. Du coté de l’institution, cela permet de faire vivre les parents : “que va-t-on raconter aux parents de cet projet ?”. Lorsque l’institution prend en charge des adulte, c’est le lien avec l’extérieur comme public qui va être important :  quelle image est ce que les autres ont de nous ? Que savent-ils, qu’imaginent-ils de nos vies ? de nos difficultés ? de nos bonheurs ?

Trois effets positifs

Un compte Facebook a pour une institution psychosociale, de soin, ou éducative au moins trois effets positifs.

C’est un dispositif de formation. Il permet aux institutions et à ses membres de se former aux dynamiques de l’Internet, d’en comprendre le fonctionnement, et de se départir des préjugés qui jusqu’à présent les retiennent loin de l’Internet

Il ouvre sur le monde. Facebook n’est pas une fenêtre du monde. C’est le monde. La culture bat dans Facebook. C’est un espace avec lequel il faut compter. Comment peut on faire un travail de réinsertion et être désinséré de ce qui fait lien pour tant de personnes

Il donne à comprendre le travail qui est effectué dans l’institution. Le travail éducatif est un travail subtil. Les accompagnements se sont sur des détails de la vie de tous les jours qui peuvent être difficile à saisir de l’extérieur. Les parents saisissent parfois mal le travail qui est effectué avec leur enfant. Ils font confiance, ce qui est nécessaire, mais la compréhension de ce qui est au travail lorsqu’un éducateur passe de longs moments à ne rien faire avec un adolescent, ou un psychothérapeute à regarder l’enfant dessiner est un véritable plus dans les prise en charge.

 

Le compte va donc jouer le rôle d’une enveloppe limitante et protectrice : il met au contact l’institution avec le monde extérieur, mais sans la diluer. Elle garde toute son identité tout en profitant des multiples contacts que permet une présence dans le cyberespace. Le compte Facebook est une interface.

Il ne s’agit pas de remplacer ce qui se fait dans les institutions par Facebook. Il s’agit d’utiliser un média que la culture met à notre disposition. Facebook est neutre du point de vue de son utilisation. Il est possible de s’en servir comme espace de travail supplémentaire. C’est même nécessaire.