jeudi 16 février 2012

Psychothérapie et séduction dans la culture populaire et dans le champ clinique

On se souvient que le Docteur Paul Weston, psychothérapeute de son état, souffre de la tendre inclinaison qu’il a pour une de ses patientes. Le cas n’est pas limité à la fiction. Un sondage effectué en 2006 après de 575 psychothérapeutes montre que 87% d’entre eux ont été attirés sexuellement par un patient. Un minorité non négligeable (9,4% des hommes et 2,5% des femmes) sont passés à l’acte. L’attirance sexuelle provoque des sentiments de culpabilité, de l’anxiété ou de la confusion, pourtant près de la moitié des psychothérapeutes concernés n’ont pas cherché de l’aide.

psychothérapie et séduction dans la culture populaire

Dans la culture populaire, les relations psychothérapeute patient ont souvent été mise en avant. Très récemment, les relations entre Karl Gustav Jung et Sapina Spielrein ont fait l’objet d’un film qui montre à quel point la psychanalyse pouvait être “une méthode dangereuse”

Les dangers de la séduction sont assez récurrents dans la culture populaire. Le cas le plus fréquent est celui d’une psychothérapeute femme séduisant un patient homme.  27 films concernent ce cas de figure, tandis que le cas de psychothérapeutes hommes séduisant une patiente sont moins nombreux (15). Je ne connais pas de cas de séduction homosexuelle.

Psychothérapeute femme séduisant un patient (d’après Glen O. Gabbard, Krin Gabbard )

  • Spellbound (1945)
  • High Wall (1947)
  • Dead heat an a Merr-Go-Round (1966)
  • Zelig (1983)
  • From beyond (1986)
  • Hunk (1987)
  • Mr. Jones (1993)
  • Tin Cup (1996)
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    Psychothérapeute homme séduisant une patiente (d’après Glen O. Gabbard, Krin Gabbard )

  • Carefree (1938)
  • Lilith (1964)
  • Lovesick (1983)
  • Bad Dreams (1988)
  • Husband and Wifes (1962)
  • The Net (1995)
  • Bliss (1997)
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    Ces films mettent en image un fantasme de séduction, c’est à dire une “scène réelle ou fantasmatique, où le sujet (généralement un enfant), subit passivement, de la part d’un autre (le plus souvent un adulte), des avances ou des manœuvres sexuelles” (Laplanche et Pontalis). Ces fantasmes de séduction sont en lien avec le complexe d’Œdipe. La séduction est qui le plus souvent mise en scène est une séduction maternelle. On pourrait la traduire ainsi : “une mère séduit un fils”. Est-ce du fait que la situation de psychothérapie est une situation de soin, et que par conséquent elle rappelle les soins qu’une mère donne à son enfant ?

     

    Psychothérapie et séduction dans le champ clinique

    Carol Martin a exploré la question  en utilisant la méthode clinique. 13 psychothérapeutes (7 hommes), dont deux psychologues cliniciens et deux psychanalystes ont été interrogés sur la manière dont ils ont pu être attirés sexuellement par des clients, et la manière dont ils ont géré la situation. Tous s’accordent à reconnaitre les moments ou les frontières sont franchies mais le consensus est moins évident lorsqu’il s’agit de fantasmes.

    L’attirance sexuelle est considérée comme normale et non nécessairement dommageable pour le patient mais le consensus devient moins précis lorsqu’il s’agit de définir ou commence et ou se termine l’attirance sexuelle. Pour certains, les fantasmes du psychothérapeute sont problématiques, pour d’autres ils font partie du processus psychothérapeutique et doivent être pris en compte par le psychothérapeute. Le psychothérapeute doit prendre conscience de l’attirance sexuelle et des affects qui y sont associés (anxiété, culpabilité, honte) et traiter la question d’une façon qui soit finalement bénéfique pour le patient.

    La crispation sur le cadre du traitement est le signe d’un échec de ce processus. Il produit par ailleurs souvent chez le patient l’impression d’être rejeté et peut conduire à une fin prématurée de la psychothérapie. Les postures moralisatrices ou omnipotentes, la projection sur le client des désirs sexuels, les passages à l’acte sous forme de caresses, d’étreintes, les rencontres en dehors du  cabinet en sont d’autres signes

     

     

    pdf-file-logo-icon (1)Martin, C., Godfrey, M., Meekums, B., and Madill, A. (2011). Managing boundaries under pressure: A qualitative study of therapists’ experiences of sexual attraction in therapy. Counselling and Psychotherapy Research, 11 (4), 248-256 DOI: 10.1080/14733145.2010.519045

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