vendredi 22 mars 2013

Karl, reste dans la maison ! Analyse d’un phénomène Internet

Karl Stay in the house

Karl, stay in the house!” est un de ces phénomènes créés par et dans l’Internet. La phrase est tirée de la série télévisée et de la bande-dessinée The Walking Dead.

Un phénomène Internet est un contenu populaire. Il peut s’agir d’une vidéo, d’une image, d’un mot tiré d’un jeu vidéo, d’une bande-dessinée ou d’une série télévisée. Le média est partagé de proche en proche sur les forums et les réseaux sociaux, puis décliné dans plusieurs

Le phénomène “Karl, stay in the house!”

Rick Grimes est officier de police. Blessé au cours d’une opération, il se réveille quelques jours plus tard dans un hôpital  dévasté pour constater que le monde a été dévasté par des zombies. Il part à la recherche de son fils et de sa femme qu’il finit par retrouver. C’est à ce moment que la fameuse phrase “Karl, stay in the house” apparait.

Elle est prononcée par Lori, la mère de Karl, ou par son père. Elle est annonciatrice d’un danger imminent. Mais de façon répétitive, Karl se retrouve dans un danger encore plus grand que celui que auquel son père ou sa mère souhaitaient le soustraire.

Comment comprendre que cette phrase soit particulièrement sélectionnée et partagée par tant de personnes ?  “Karl, stay in the house” entre en résonnance avec l’inconscient des aficionados de la série, puis avec des publics de plus en plus large parce que scène condense plusieurs niveaux

 

L’épreuve de la séparation

Karl, stay in the house” annonce un moment dramatique. La phrase annonce d’abord une séparation, puisque l’enfant doit rester dans la maison tandis que les parents vont au-dehors combattre le danger qui approche. Nous savons que la séparation est au cours du développement de l’enfant une épreuve qui peut être structurante ou traumatique. La façon dont les séparations sont vécues et construites par l’enfant marquent profondément sa psychologie et son avenir d’homme. Cet élément est si important qu’on le retrouve dans mains mythes et contes populaires, comme dans Le loup et les sept chevreaux. The walking dead donne en donne une version  grimaçante.

L’annonce d’un malheur

“Karl, stay in the house” annonce un malheur imminent. Puisqu’il s’agit de walkers, c’est à dire de zombies, il est assez facile de comprendre que ce qui marche vers l’enfant et ses parents est la mort elle même. De quelle morts s’agit-il ? Il peut s’agir d’ancêtres dont des droits ont été insuffisamment reconnus, comme dans les croyances populaires. Le mort est alors un revenant ou un fantôme, c’est à dire une figuration plus ou moins reconnaissable d’éléments de l’histoire familiale. Il peut aussi s’agir des désirs inconscients de mort et d’agression qui circulent dans toutes les familles

La maison-mère

De façon très banale, les maisons sont des représentants de la mère comme maison première. Même les maisons délabrées et sales de The Walking Dead sont des endroits plus sûrs que les grands espaces ouverts parcourus par des walkers. “Karl, stay in the house” est alors l’ordre donné à l’enfant de retourner dans la matrice maternelle. Le “Stay in the house” s’entend alors moins comme un désir de protection que comme un désir non-naissance.  En effet, elle est prononcée à partir du moment où les parents se retrouvent. La phrase souligne alors le désir pour les adultes que leurs retrouvailles ne portent pas fruit : que l’enfant reste dans la matrice maternelle  ! Pour Karl,“Rester dans la maison”, c’est rester dans la mère, c’est ne jamais prendre le risque de naitre. On comprend qu’il n’obéisse jamais à cet ordre.

 

 

Ce que ce “Karl, reste dans la maison!” figure, c’est le fantasme “On bat un enfant” (Freud, 1919). En effet, Karl se retrouve souvent loin de la protection parentale. “Where’s Karl?” (Ou est Karl ?) est une autre phrase que les parents disent souvent. Et bien évidement, Karl est alors dans une situation plus que problématique ! Karl est alors le représentant de l’enfant-aimé-mais-insuffisamment-protégé par des parents trop pris par leurs catastrophes personnelles et conjugales

Citer la phrase, c’est reconnaitre qu’elle entre en résonnance avec sa vie affective. C’est remettre au travail ce qui a été touché par la situation. Celle-ci permet de s’identifier à l’enfant, au couple des parents, ou à un des deux parents. Nous pouvons ainsi explorer successivement les poles actifs et passifs de la relation parent-enfant en étant l’enfant abandonné/battu/tué ou le parent abandonnant/maltraitant/meurtrier/protecteur

jeudi 21 mars 2013

Les réseaux sociaux, l’empathie et les adolescents

Facebook Like Thumb

Selon un sondage effectué pour l’ONG 30 Hour Famine, 55% des adolescents questionnés affirment que des réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter les a rendu plus conscients des besoins des autres. La même question avait été posée en 2011, et seulement 44 pourcent des adolescents s’étaient lors sentis concernés.  Pour Regina Corson, la Vice Présidente de l’association, cette augmentation est un signe des temps. Mais cela signe-t-il une augmentation de l’empathie ? Fréquenter les réseaux sociaux peut-il rendre plus empathique ? 

Les trois étages de l’empathie

L’empathie est un phénomène complexe qui plonge ses racines dans jusque dans le secret de nos cellules. En effet, elle est pour une part innée. Mais comme pour tout ce qui concerne l’homme, cette part innée est largement modifiée par nos expériences et par notre capacité à refuser consciemment et inconsciemment de prendre en charge des émotions et des pensée.

Dans le travail qu’il a consacré à l’empathie, Serge Tisseron distingue trois niveaux différents. Le premier est constitué par l’identification. La personne comprend le point de vue de l’autre et ce qu’elle ressent. Deux points sont ici important. Le premier est que l’identification ne nécessite pas de reconnaitre à l’autre le statut d’être humain. Il est possible d’éprouve de l’empathie pour un animal, un végétal, et même pour un objet. Le second est que cette empathie est émotionnelle et cognitive. Vers 4 ans et demi, l’enfant commence à pouvoir se faire des représentions de ce que pense l’autre. Il construit une “théorie de l’esprit”

Le second étage de l’empathie est constitué par la reconnaissance mutuelle. Non seulement la personne s’identifie à un autre, mais elle accorde à l’autre la possibilité de s’identifier à elle, de la comprendre et de ressentir ce qu’elle ressent.

Enfin, le dernier étage correspond à ce que Serge Tisseron appelle l’empathie extimisante. Elle consiste à accepter la possibilité de reconnaitre des parties ignorées de soi même à l’intérieur d’une relation d’empathie réciproque.

L’empathie et les mondes en ligne.

Au vu de ce qui précède, les mondes en ligne posent pour l’empathie un double défi. L’empathie ne commence véritablement qu’avec le face à face; elle suppose le contact avec de l’épiphanie du visage (Lévinas). Elle est fille de la co-présence. Le régime différent de l’absence et de la présence qui existe en ligne rend donc difficile l’établissement d’un lien empathique réciproque. L’autre n’est pas tout à fait là. Il est là dans une image, ou dans des message, bref, par des traces. La relation à l’autre est donc médiatisée.

Cela n’empêche pas totalement l’empathie puisque nous avons vus que celle ci pouvait être unilatérale. Le problème qui se pose alors  n’est plus l’établissement du lien, mais la qualité de celui-ci. Il est en effet possible de comprendre l’autre pour le mieux manipuler – c’est ce que font les pervers – ou pour le réduire à un objet – c’est ce qui se passe dans la pitié.

 

Ainsi, c’est une erreur que de considérer que les réseaux sociaux rendent les adolescents plus empathiques comme on a pu le lire ici ou là. Les réseaux sociaux mettent plus facilement les adolescents au contact avec d’autres personnes, ou avec d’autres réalités, dont certaines peuvent appeler l’empathie. Mais ce que chaque adolescent va faire de cette situation reste variable. Certains vont se sentir concernés (empathie unilatérale) tandis que d’autres vont se fermer.

mardi 19 mars 2013

Quatre bonnes façons de répondre aux attaques sexistes en ligne

Emergency Stop Button 2
En ces jours ou les conduites sexistes de quelques uns sont discutées, il est bon de rappeler que les mondes numériques disposent de commandes qui n’existent pas IRL et qui sont d’une grande efficacité :

/ban
/kick
/mute
/report